Myst

CONCEPTEUR : Cyan - EDITEUR : Sunsoft - GENRE : Aventure
NOMBRE DE JOUEUR : 1 - ANNEE DE SORTIE : 1995

Véritable phénomène vidéo-ludique et vendu à plusieurs millions d'exemplaires dans le monde suite à sa parution sur Macintosh en 1993, Myst a eu l'excellente idée de migrer vers la 32 bits de Sega quelques mois plus tard. Et grand bien lui en a pris, croyez-moi.

Il y a des jeux comme ça, des jeux qui vous marquent à vie et vous laissent un souvenir incroyable une fois terminé. Ces jeux sont très rares, se comptent sur les doigts de la main et sans aucun doute possible, Myst en fait parti.
Tout commence en 1991 lorsque deux frères, Rand et Robyn Miller, se lance dans la création d'un jeu fortement inspiré de l'Île Mystérieuse de Jules Verne dont ils sont fans. Le soft, en plus de posséder un concept totalement novateur pour l'époque, doit s'architecturer autour de la résolution d'énigmes logiques dans un univers non-violent. Après avoir fondé leur propre société de développement nommée Cyan, Rand et Robyn vont, pendant un peu plus de deux années, passer le plus clair de leur temps à créer Myst, quasiment seuls dans leur garage. Secondés partiellement par leurs amis Chris Brandkamp et Chuck Carter (respectivement au son et au graphisme), les frères Miller vont eux-mêmes programmer leur titre de A à Z. De l'écriture du synopsis à la conception de l'univers en passant par la réalisation des décors, la composition des musiques ou encore la création des animations, ils prendront tout en charge avec brio (allant même jusqu'à tenir le rôle de certains personnages du jeu). En 1993, Myst sort plutôt confidentiellement sur Macintosh et rencontre, à la surprise générale, un immense succès public et critique. Ceci l'amène logiquement à paraître sur PC un an plus tard puis sur Saturn, Playstation et Jaguar en 1995, faisant exploser les ventes. A ce jour, plus de huit millions d'unités de Myst tout supports confondus ont été vendus. Respect à vous Messieurs Miller !!
L'histoire du jeu vous mets dans la peau d'un homme qui, par un beau matin, a découvert par hasard un vieux livre jauni avec le mot "Myst" inscrit sur la couverture. Curieux de découvrir son contenu, vous l'avez ouvert sans plus attendre. Rapidement, vous vous êtes rendu-compte qu'il s'agissait d'un journal décrivant avec soins une mystérieuse île. Littéralement absorbé par les écrits passionnants de ce livre, vous avez lu encore et encore, incapable de vous arrêter. Petit à petit, vous vous êtes enfoncé de plus en plus profondément dans le monde étrange de Myst. Puis, une voile noir vous a enveloppé, un grondement sourd s'est fait entendre et vous vous êtes senti flotté dans l'air, avant de sombrer dans l'inconscience. En revenant à vous quelques minutes plus tard, vous avez vite compris que l'imaginaire était devenu réalité : vous étiez sur l'île de Myst. Quelque chose de terrible semblait menacer dangereusement cet univers, quelques chose dont tout semblait indiquer qu'il en revenait à vous de le détruire. Je n'en dirais pas plus, au risque de spoiler une intrigue ô combien passionnante.

En quelque sorte, Myst peut s'apparenter à une longue investigation solitaire. Eh oui, de bout en bout de l'aventure, vous serez seul(e) pour mener à bien votre quête, que vous le vouliez ou non. Bien sûr, vous aurez l'occasion de voir quelques messages vidéos (via des cinématiques filmées avec de "vrais" acteurs) où divers protagonistes donnent des informations mais la plupart du temps, vous évoluerez aussi seul que Robinson Crusoë sur son île. Toutefois, cette solitude du joueur n'est pas une tare pour le soft, loin de là. Bien au contraire, cela renforce énormément le sentiment de mystère et d'oppression que l'on éprouve en jouant au titre des frères Miller. Paddle en main, on se sent perdu et vulnérable, en proie à un manque de repères évident dans un endroit dont on ne connaît rien et dont il faut tout apprendre.
La grande richesse de Myst est bien entendu les différentes énigmes qui parsèment l'aventure. Elles sont nombreuses, particulièrement bien pensées, originales et d'une finesse rare (on est à des années lumières du sempiternel "chercher clé pour ouvrir porte"). Quant à leur difficulté, si certaines se révèlent moins ardues que d'autres, la plupart d'entre elles vous donneront beaucoup de fil à retordre. Attention toutefois, je n'ai pas dis qu'elles étaient impossibles, soyons d'accord... non mais !! Aussi, il faudra faire preuve de réflexion bien sûr, mais aussi et surtout d'observation. En effet, beaucoup d'indices sont disséminés ça et là dans les divers environnements du jeu, à vous d'être attentif. Il faudra également lire précautionneusement les livres présents dans la bibliothèque (lieu très important), ceux-ci renferment des trésors sur la compréhension des énigmes mais aussi sur l'univers de Myst. A ce propos, le jeu étant traduit dans la langue de Molière (chose rare sur Saturn), il est de bonne augure de voir que les écrits ont été particulièrement soignés et se relèvent très agréables à lire. Les histoires qui y sont contées sont magnifiques et feront voyager votre esprit comme jamais. Pour en revenir aux énigmes, toutes celles ici présentes sont un vrai défi pour les neurones et c'est un réel plaisir que de s'y plonger. Lors de sa sortie, Myst a-t-il fait basculer le monde du jeu vidéo dans l'âge adulte ? Il n'y a qu'un pas que je franchi volontiers : oui, définitivement oui.
En plus de cela, le soft de Cyan a également inventé un principe de jeu totalement inédit pour l'époque (ne parle-t-on pas maintenant de myst-like pour un jeu de ce style ?). Dans la pratique, cela se traduit par une ergonomie qui frôle la perfection : une vue subjective avec une interface minimum pour un maximum d'insertion de la part du joueur. Seule une petite main dirigeable est présente à l'écran. En la déplaçant de haut en bas et de gauche à droite, elle montre du doigt la direction choisie, il ne reste plus alors qu'à appuyer sur un des boutons pour avancer, simple comme bonjour non ? Lorsqu'une interaction peut être effectuer (prise d'un objet, appui sur un bouton, etc.), c'est exactement le même principe. Vous l'aurez compris, la maniabilité est parfaite au paddle comme à la souris. Il est par conséquent difficile de ne pas être immergé à 100% dans ce jeu fabuleux, d'autant plus que le design général atteint des sommets.

Eh oui forcément, Myst ne serait pas devenu ce jeu si culte sans une réalisation technique exceptionnelle. Que ce soit sur le plan visuel, sonore ou sur l'animation, les frères Miller ont ici démontré une fois de plus leur énorme talent.
Graphiquement tout d'abord, Myst peut sans hésiter s'apparenter à une véritable œuvre d'art. Les environnements traversés sont époustouflants de beauté et s'avèrent très proche du photo-réalisme. Compte-tenu de la présence d'images fixes, chaque écran a été peaufiné jusqu'à l'extrême et fourmille de détails à s'en faire exploser la rétine. Regardez l'écorce des arbres, le bois des meubles, les ornements des tapisseries et des tapis, les ondulations de l'eau, j'en passe et des meilleurs : là, vous comprendrez mon enthousiasme. Le plaisir éprouvé lors des vas-et-vient dans l'univers de Myst est incommensurable, on ne se lasse jamais d'admirer l'architecture qui y est présente. De nos jours, il existe des jeux plus beaux que celui-là c'est évident, mais aucun d'entre eux ne peut prétendre posséder un monde si riche, si cohérent, si envoûtant, bref... si parfait.
Et que dire de l'ambiance sonore ? Les musiques, qui ne se font entendre qu'à certains endroits bien précis, sont (allez, n'ayons pas peur des mots) extraordinaires. Belles, douces, enivrantes, mystérieuses, les qualificatifs manquent à l'appel pour qualifier les somptueuses mélodies de Myst. Elles accompagnent merveilleusement bien les pas du joueur dans sa quête et déversent une aura magique d'une émotion rare, à même de "soulever bien des âmes" comme dirait une certaine Sarah. Les bruitages ne sont pas en reste, rassurez-vous. Malgré leur discrétion, ils jouent néanmoins un rôle indispensable dans l'instauration de l'atmosphère solitaire et intrigante du jeu. Ici, c'est le vent qui souffle avec insistance, là ce sont les oiseaux qui chantonnent doucement ou bien encore le clapotis des vagues contre le quai, le grincement d'une porte, etc. Tout est là pour que l'immersion soit totale. En clair, Myst possède l'une des plus belles bande-son jamais créées dans un jeu vidéo, et je pèse mes mots.

Côté animation, le constat est peut-être moins dithyrambique mais reste tout ce qu'il y a de positif. Etant donné que le scrolling n'est qu'en images fixes, on ne trouve pas dans Myst des mouvements de caméra plein de haute voltige. Non, c'est plutôt à l'image du soft, c'est-à-dire calme et serein. Tout n'est pas figé pour autant, on trouve donc de temps à autre de petites animations dans les décors. On peut ainsi voir des oiseaux s'envoler à notre passage, de l'eau s'écouler d'un ruisseau, un mécanisme se mettre en marche, etc. Certes, on aurait aimé qu'il y en ai un peu plus, mais cela suffit tout de même à rendre l'ensemble un peu plus vivant, d'autant plus que c'est parfaitement réalisé.
Enfin, pour ce qui est de la durée de vie, force est de constater que Myst n'est pas relativement long. Il n'empêche qu'il sait tenir en haleine pendant des heures et des heures grâce (ou à cause, tout dépend de votre goût pour la réflexion) des énigmes. Et puis, se promener dans ces paysages est tellement hypnotisant et apaisant que l'on ne s'en lasse jamais. Terminer le jeu est un véritable crève-cœur, on voudrait que l'aventure ne connaisse pas de fin.
Comme vous le savez certainement, Myst a connu plusieurs séquelles par la suite. Riven (le deuxième épisode) nous intéresse particulièrement parce qu'il a vu le jour sur notre chère Saturn en 1997. Plus beau, plus long, plus difficile, il est le complément parfait de Myst. Toutefois, le reste de la série est bien évidemment à découvrir de toute urgence, et peu importe sur quel support.

Que dire de plus, si ce n'est que je suis tombé complètement amoureux de ce jeu exceptionnel. Myst est une merveille, un titre emprunt de poésie et de magie comme aucun autre. On ne ressort pas indemne d'un voyage tel que celui-là, il nous transforme tous en rêveur invétéré, sans exception.

OULIPOP

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